Réflexions durant le confinement

15 avril 2020

Tout d’abord, j’ai commencé ma période d’isolement, le 6 mars dernier, en ne participant pas à l’activité de la Journée internationale des droits des femmes, craignant de faire entrer le coronavirus chez moi. Avec un conjoint de 85 ans, je ne voulais prendre aucun risque. J’ai poursuivi mon confinement le 9 (pas de messe), le 10 (pas de taï-chi), le 11 (pas d’activité sectorielle), de sorte que je commençais à m’habituer à demeurer chez moi quand le premier ministre a annoncé que tout le Québec se mettait sur PAUSE.

Depuis ce temps, je ne sors que pour marcher, les jours de beau temps avec ma chère Bella qui est source de réconfort pour André et moi.

Alors commencèrent les points de presse quotidiens de M. Legault, accompagné de la ministre de la Santé, Danielle McCann et du dynamique directeur de la santé publique, le Dr Horacio Arruda. À 13 heures, je suis toujours devant mon poste de télévision et, de jour en jour, les nouvelles deviennent de plus en plus accablantes, surtout depuis que la pandémie a envahi les endroits où vivent les aînés. Que ce soit les Centres de soins de longue durée (CHSLD) publics et privés, les Résidences pour aînés (RPA) ou les Ressources intermédiaires (RI), force est de constater que certains de ces milieux de vie sont devenus des mouroirs. Comme Québécoise, je me sens interpellée par cette situation, même si je suis impuissante. L’AREQ a toujours eu comme priorité de veiller au respect et au droit des aînés de vivre en sécurité et dans la dignité et elle a multiplié les démarches en ce sens. Elle devra revenir en force sur cette préoccupation lorsque la crise sera passée.

Les gouvernements qui se sont succédé à Québec savent depuis 2006 qu’une pandémie pouvait nous tomber dessus à n’importe quel moment. Ils savaient aussi depuis longtemps que nous avions des CHSLD, des RPA et des RI qui souffraient d’un manque de personnel chronique et qui, pour plusieurs, étaient devenus vétustes et inadéquats pour constituer un vrai milieu de vie pour les aînés. La ministre des aînés, la souriante madame Blais, y est allée, à l’été 2018, d’une proposition de Maisons des aînés. Magnifique projet! Mais avant de construire de belles maisons, ne faudrait-il pas trouver du personnel pour travailler dans les locaux actuels que l’on pourrait rénover et mettre au goût du jour ? Et ce personnel, ne faudrait-il pas le rémunérer convenablement si on veut le garder ? Quand on pense que dans les CHSLD privés le salaire se situe entre 13 $ et 15 $ l’heure et que dans les CHSLD publics, il est de 22 $ l’heure, avec les risques qui accompagnent le fait de travailler avec des gens très malades, parfois confus, parfois en crise…

Ma réflexion a aussi porté sur le fait que nous avons deux types de CHSLD, donc deux types d’administration et deux types de financement. Les CHSLD publics sont financés par la RAMQ qui fixe le loyer mensuel des locataires selon leur revenu. Ils sont gérés par les CISSS ou les CIUSSS qui sont d’énormes structures créées par le Dr Barrette. La direction de ces structures ne connaît pas toujours les besoins des CHSLD situés sur son territoire et est loin de la gestion quotidienne. Les CHSLD privés sont administrés par des gens d’affaires qui désirent faire des profits. C’est évident.  Qui ouvrirait un CHSLD par altruisme? Alors, il faut dépenser le moins possible. Les loyers varient d’un endroit à l’autre et peuvent aller jusqu’à 10 000 $ par mois, même si les préposés aux bénéficiaires sont sous-payés. Le gouvernement savait tout cela avant la pandémie et n’a rien fait. Certains CHSLD privés qui avaient été dénoncés par des rapports accablants auraient dû perdre leur certification.

Le gouvernement n’aura pas le choix de s’attaquer au dossier des résidences pour personnes âgées lorsqu’il reprendra ses activités. Il en sera de même pour l’AREQ, dont la mission « consiste à promouvoir et à défendre les intérêts et les droits culturels, sociaux, économiques et environnementaux de ses membres et des personnes aînées et à contribuer à la réalisation d’une société égalitaire, démocratique, solidaire et pacifiste. » L’AREQ devra défendre vigoureusement, dans son prochain plan d’action, un hébergement de qualité, à coût raisonnable pour tous les aînés.

11 mai 2020

Le temps file, les réflexions continuent de m’habiter, et je dirais, de m’envahir, car plus on découvre ce qui s’est passé, plus on souhaite éviter le calvaire vécu par toutes les personnes âgées qui vivaient en CHSLD et qui ont été terrassées par la COVID-19. J’en suis venue à souhaiter fortement demeurer chez moi jusqu’à la fin et pour rien au monde, je ne voudrais habiter dans un CHSLD. Le soutien à domicile est la mesure que le gouvernement devrait prioriser et subventionner davantage. Si une maladie dégénérative devait m’empêcher de vivre chez moi, je me propose de rédiger mes volontés de manière anticipée pour demander l’aide médicale à mourir.

 

Par : Lise Labelle, Île de Montréal (06) secteur Ahuntsic-Ouest (N)

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