Le 19 septembre dernier, en conférence de presse, deux ministres font une annonce « de la plus haute importance » : désormais, les ainés vulnérables auront droit à un deuxième bain en CHSLD.
Bien évidemment, nous saluons le fait qu’enfin, des montants supplémentaires seront accordés pour répondre aux besoins d’hygiène de base des personnes hébergées. Il faut souligner chaque gain pour les aînés. Or, au travers des applaudissements, plusieurs se demandent s’il ne s’agit pas d’une annonce pour faire oublier la hausse de salaire substantielle accordée aux médecins. Un bain de plus par résident contre un chèque de 40 000 $ à chaque omnipraticien, n’est-ce pas en fait un prix de consolation pour nos aînés? Depuis le temps que les organismes d’aînés réclament ces bains et qu’ils doivent se buter à un ministre froid et complètement fermé à l’idée, il est plutôt difficile d’évacuer le cynisme qui nous habite.
D’autre part, certains voient dans cette annonce un défi considérable, voire insurmontable, car la main-d’œuvre qualifiée n’est pas suffisante dans toutes les régions. Nous apprenions d’ailleurs que seulement pour l’Abitibi-Témiscamingue, on évaluerait à près de 400 le nombre de postes vacants pour des préposés en CHSLD. Aussi, faut-il le rappeler, les équipes de soins actuelles sont déjà surchargées en raison des compressions budgétaires récurrentes et des multiples transformations qu’a connues le réseau de la santé au cours des dernières années. De surcroit, les médecins se font de plus en plus rares en CHSLD.
Mais, au-delà de ces facteurs techniques et politiques, tout aussi valables soient-ils, il y a aussi un grand questionnement à faire sur le principe derrière tout ça. Nous entendons souvent que l’on juge la qualité d’une société de la façon dont elle traite ses aînés. Si, au Québec, avoir la bénédiction d’un deuxième bain représente ce « monde meilleur » pour lequel nous contribuons tous collectivement, à l’évidence, nous avons encore beaucoup de chemin à faire. Il faut donc en revenir encore une fois à cette question fondamentale : quelle est la place des aînés dans notre société?
Nous, les personnes aînées, voulons des soins de santé adéquats lorsque l’on est malade ou en perte d’autonomie. Qu’en situation de vulnérabilité, nous puissions vivre dans un environnement sécuritaire et à l’abri de la maltraitance. Nous sommes des citoyennes et des citoyens à part entière et tenons à être respectés.
Enfin, nous voulons rappeler que le vieillissement n’est que le prolongement de la jeunesse. Que ceux et celles qui élaborent les lois, les politiques et les réformes d’aujourd’hui se rappellent qu’ils façonnent aussi leur avenir lorsqu’ils prennent des décisions qui touchent les aînés. L’enjeu est global.
Merci pour le deuxième bain, monsieur Barrette. En espérant que ce soit le présage d’une plus grande considération de l’enjeu du vieillissement de la population.
Lise Lapointe, présidente de l’AREQ-CSQ